Etude de cas 1
Arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 11 avril 2018.
Commentaire: Virgine Gomez
La consécration par la 1ère chambre civile de la Cour de Cassation le 11 avril 2018, de la primauté du partage
Ou les effets limités de la filiation tardivement reconnue !
Les faits sont les suivants : Une succession est partagée depuis quelques années entre le conjoint survivant et ses deux enfants.
Postérieurement à la signature de cet acte de partage, on apprend que le défunt est le père de trois enfants.
Une action en recherche de paternité sera en effet introduite par la maitresse du de cujus, qui prétend que son fils a pour père ce dernier. La paternité sera confirmée par la Justice qui autorisera ce troisième enfant a porter le nom de son père.
Sur le plan extra patrimonial, toutes les conséquences sont tirées de cette filiation.
Sur le plan patrimonial, en revanche, il n’en va de même : l’arrêt rendu par la Cour d’Appel d’Aix en Provence le 29 juin 2016, confirmé par la décision récente de la première chambre civile de la Cour de Cassation, rendu le 11 avril 2018, limitera les effets de cette filiation tardive, afin préserver la sécurité du partage.
Devenant un héritier, au même titre que les deux autres enfants, le dernier né a vocation à recevoir sa part de réserve individuelle. Il revendiquera d’ailleurs cette part dans la succession de son père.
L’arrêt rendu par la Cour d’Appel précitée va rejeter sa double demande.
D’une part, les juges du fond estiment que le fils ne peut être alloti de sa part de réserve individuelle. D’autre part, ils rejetteront sa demande en nullité de l’acte de partage fondée sur l’erreur par omission d’héritier.
Cet arrêt vient d’être confirmé par une décision toute récente de la Cour de Cassation.
Dans son arrêt, rendu par sa 1ère chambre civile, le 11 avril dernier, la Cour suprême approuve les juges du fonds.
Ce vice du consentement (l’erreur) qui permet d’annuler un partage au même titre que le dol ou la violence, n’est ici pas retenu pour annuler le partage.
La raison : il s’est écoulé trop de temps entre la demande en reconnaissance en paternité et la signature définitive du partage.
Nos juridictions restent bien « gardiennes « de la sécurité des transactions !
Etude de cas 2
Une forme particulière de recel : OMISSION VOLONTAIRE D’héritier
Monsieur Jacques André est décédé depuis plus d’un an. Avec sa tendre épouse Hélène , il a eu trois enfants : Bernadette, Charlotte, et Louis. Les époux étaient mariés sous le régime de la séparation de biens depuis près de trente ans. Le notaire de famille a réglé la succession de la manière la plus traditionnelle. Après avoir interrogé le fichier central des dispositions des dernières volontés, il a pu établir son acte de notoriété, conformément à la réponse de cet organisme (pas de testament enregistré au fichier central), et au livret de famille transmis par la veuve.
L’acte de notoriété précise alors que le défunt laisse pour recueillir sa succession ses trois enfants, héritiers chacun pour un tiers sous l’usufruit de leur mère.
La déclaration de succession est déposée et le partage de la nue-propriété entre les enfants rapidement établi dans cette famille apparemment unie.
Quelques mois plus tard, je fais la rencontre d’une cliente prénommée Zoée, qui vit à l’étranger. Elle m’annonce être la fille cachée de Monsieur André, et avoir été récemment informée du décès de son père par une amie et collègue de travail exerçant pour la filiale française de sa même société. Elle me transmet la copie authentique de l’acte de reconnaissance, me précisant que son père l’avait abandonnée dès qu’il avait appris la grossesse de sa maîtresse.
A l'en croire, Hélène ne pouvait ignorer son existence, car des villageois étaient au courant de cette relation « cachée », et du motif du brusque départ de sa mère enceinte. De violentes disputes avaient éclaté entre les époux . Des témoins toujours en vie pouvaient en attester. En outre et surtout, Hélène avait remis une lettre de menace à la maîtresse de son mari : elle l’invitait au plus vite à cesser toute relation avec son époux, sans quoi elle avertirait ses parents de sa grossesse. « Le déshonneur rejaillirait sur toute votre famille ! », avait-elle ajouté. Les conséquences patrimoniales de l’existence d’un quatrième héritier
Après avoir obtenu toutes les confirmations nécessaires des dires de Zoée, il faudra alors rectifier les actes notariés. Les trois enfants ne sont plus héritiers chacun pour un tiers et le conjoint survivant ne peut plus, conformément aux dispositions de l’article 757 du code civil, opter pour l’usufruit de la totalité des droits existants. La raison : nous sommes en présence d’une enfant qui n’est pas issue des deux époux. Dans ce cas de figure, il faudra établir une notoriété rectificative, une déclaration de succession complémentaire…
Mais c’est surtout le sort du partage signé entre la mère et ses trois enfants qui pose problème. En effet, l’omission d’un héritier devient un cas d’annulation du partage !
La veuve a volontairement dissimulé l’existence de cet enfant , issu d’un adultère. Aucun doute, votre avocat ayant effectué toutes les démarches nécessaires pour le vérifier.
Hélène s’est bien rendue coupable de recel et à ce titre, elle doit verser des dommages et intérêts à Zoée.
En outre, conformément aux dispositions de l’article 778 du Code Civil, Hélène « doit etre tenue de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont elle a eu la jouissance depuis l’ouverture de la succession».
L’application du recel en cas d’omission intentionnelle d’un héritier est notamment issue d’une jurisprudence de la première chambre civile de la Cour de Cassation en date du 20 septembre 2006.
Etude de cas 3
Absolue nécessité de vérifier que votre notaire a bien établi un attestation de propriété immobilière suite au décès d un membre de la famille.
Exemple concret, son absence a pu permettre à une indivision successorale d’être volée. C’est beaucoup plus facile lorsque les membres de l’indivision ne s’entendent pas….
J’ai l’honneur de vous informer des faits suivants :
Ma cliente Mme Dupont, domiciliée à, née le , est la fille de Monsieur X , lui-même né le .... et de Mme Y , son épouse en secondes noces, née en à.... Voir Pièce n°1
Monsieur X est décédé le..... pièce 2
Le couple a eu six enfants, les nommer
Or, il vient d’être découvert contre toute attente il y a quelques semaines, qu’un bien immobilier relevant de la succession de M X , a fait, le ... 2018, l’objet d’une cession à un tiers Mme ..... Pièce n°3
Il ressort de l’acte de vente et surtout de son annexe, à savoir un jugement du TGI de...... en date du......, que cette cession du..... 2017 portait sur un bien immobilier relevant d’une succession déclarée comme « vacante » (une succession est vacante notamment lors ce qu il n y a pas d’héritiers connus) ; ce qui n’est aucunement le cas.
Le jugement fut rendu à la requête du syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier du ...... , syndicat représenté par son syndic en exercice : ……….
Etant donné que le défunt a une descendance d’au moins 6 héritières notoirement connues, il est stupéfiant de constater qu’aucune d’entre elles n’ait été avisée de la procédure engagée. Certes, le syndic est titulaire d’un privilège occulte. Mais delà a ignorer l'existence d'une descendance!
Au demeurant un acte de notoriété a pu être dressé par Maître W , notaire a ...., le.... Cet acte a pour but d’établir la dévolution successorale suite au décès de M. X (c est a dire designer les héritiers en précisant leurs droits dans la succession). Pièce n° 4.
Cet acte de notoriété n’a pas à être publié au fichier immobilier.
Mais à la suite du décès de Mr X , curieusement, aucune attestation de propriété immobilière portant sur les lots vendus, n’a été publiée!
A l’époque du décès de son mari, le conjoint survivant, n’était pas exonéré de droits de succession. J’imagine aussi, à ce titre, qu’une déclaration de succession a dû être déposée car outre, plusieurs biens immobiliers revenaient à l’indivision successorale.
En effet, la lecture de l’Etat hors formalités (EHF) n° ...., demandé le... 2018, permet de relever qu’aucune attestation de propriété immobilière (API) concernant les lots de copropriété vendus, objet des présentes, n’a été publiée au fichier immobilier.
Cet acte aurait pourtant permis de connaitre la dévolution successorale de M X, c’est à dire l’identité précise des héritiers, leur option successorale, et les droits précis que chacun détenait dans cette succession.
C’est d’ailleurs cet acte (l’attestation de propriété immobilière) qui constitue l’origine de propriété directe, qui aurait permis en toute légalité au notaire, Mr W, de recevoir son acte de vente. Ainsi, les héritiers de M. X auraient perçus a l'occasion de cette vente, une partie de son prix.
Hors cet acte de vente, a bien quant à lui fait l’objet d’une publication au fichier immobilier, dans le délai légal requis, soit un mois Pièce n°5.
La plaignante entend donc porter plainte contre de tels faits, qui conduisent à la priver ainsi d’une partie de l’héritage qui devait lui revenir. ETC...
Etude de cas 4
Exemple de correspondance à adresser au notaire chargé du règlement de la succession par votre avocat …
Cher Maître,
Je suis mandatée par Monsieur A pour l’assister dans le cadre de la succession de sa mère, décédée le
La lecture de l’acte de notoriété que vous avez reçu le .... , établit que la défunte laisse QUATRE héritiers ayant des droits identiques, à défaut de testament émanant de la défunte.
Je m’étonne que vous n’ayez pas recueilli l’option des héritiers dans votre acte !
Mon client, Monsieur A , accepte quant à lui la succession de sa mère ( c’est une nécessité avant d’assigner le receleur que d’opter pour l’acceptation de la succession).
Il n’a toutefois jamais pu déclarer, comme il est mentionné dans la dite notoriété, que sa mère n’était propriétaire d’aucun bien immobilier.
Je m’étonne aussi ,que vous n’ayez pas rapatrié les liquidités de la défunte en votre Office, afin de pouvoir les répartir ultérieurement entre les héritiers.
Je vous remercie de bien vouloir établir une attestation de propriété immobilière qui permettra de vendre le bien ultérieurement.
La défunte est en effet, propriétaire d’un bien immobilier : une maison , sise à ..... comprenant une cuisine équipée, une salle de douches, deux chambres…
J’observe en outre, que depuis mon premier courrier en date du...., vous n’avez jamais contacté les héritiers, ni adressé à ces derniers et à moi-même, aucun projet d’acte d’option.
Une déclaration de succession a-t-elle été établie et adressée à l’administration fiscale par vos soins, en votre qualité d’officier ministériel chargé du règlement de la succession ?
Par ailleurs je suis, depuis ma première correspondance, en possession de différentes preuves établissant que l’un des héritiers s’est approprié des liquidités, provenant de la succession susnommée.
L’héritier receleur n’aura donc pas d’autre choix que d’accepter la succession, même si celle-ci est déficitaire, et est privé de tout droit sur les biens recelés.
Les documents que j’ai pu recueillir sont en effet constitutifs d’un recel successoral.
Je suis ainsi dans l’obligation de vous informer de tels faits !
Au demeurant, l’héritier reconnu coupable de recel successoral, conformément aux dispositions de l’article 778 du Code Civil, est, comme vous le savez, privé de plein droit de la faculté d’option et est « réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l’actif net »
Par la présente, je vous précise devoir me conformer au décret numéro 2015-282 du 11 mars 2015 relatif à la simplification de la procédure civile et à la résolution amiable des différends qui modifie l’article 56 du code de procédure civile en imposant la nécessité d’une tentative de règlement amiable du litige.
Le juge pouvant proposer aux parties une mesure de conciliation ou de médiation.
Je devrai dès lors préciser, dans le corps de mon acte introductif d’instance, les diligences accomplies pour tenter de résoudre amiablement le litige entre les héritiers.
Merci de m’adresser un courrier par retour, qui permettra de m’éclairer davantage sur vos démarches et de justifier surtout, auprès du magistrat, qu’aucun accord amiable n’a pu aboutir avant de le saisir.
Dans cette attente, je vous prie de me croire,
Votre bien dévouée,
La science du droit ne s’improvise pas, elle s’apprend et s’expérimente.